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‘Sabina Carlson Robillard, citoyenne de justice, citoyenne de paix’, décède à 34 ans

Militante au cours de deux décennies, Sabina Carlson Robillard est devenue un leader important dans les efforts de secours humanitaire en insistant sur le fait que les voix des personnes assistées devraient toujours être les plus importantes dans chaque discussion.

« Pendant que vous m’écoutez, il y a 1,5 million de conversations qui se déroulent sur le terrain, et je suis ici pour vous demander à tous comment nous les écoutons », a-t-elle déclaré lors d’une conférence à Boston en 2010 à propos du travail qu’elle avait réalisé en Haïti dans cette même année suite à un tremblement de terre qui avait coûté 200.000 vies humaines.

Déjà une militante chevronnée, elle avait fêté ses 22 ans quelques semaines avant ce discours. Plusieurs années avant cela, au collège, elle a commencé à prendre part aux manifestations et « pensait déjà profondément à ceux qui souffraient dans le monde entier, » a déclaré son père, Ken Carlson.

Après avoir reçu, il y a quatre ans, un diagnostique de sarcome à cellules claires alors qu’elle portait son enfant, Mme Robillard, qui habitait Cambridge, demeurait plus active que la plupart de ses collègues mieux portants.

Elle a travaillé comme consultante et chargée des opérations pour des organisations humanitaires à but non lucratif, et a aidé à élever sa fille et sa belle-fille tout en subissant les traitements contre un cancer. Mme Robillard, âgée de 34 ans, a même envoyé un texte à son conseiller académique de son lit d’hôpital à Massachussetts General à la veille de son décès le 16 novembre pour programmer une réunion quelques jours plus tard avec son comité consultatif en préparation de son doctorat à Tufts.

« Sans aucune prétention, elle a réorienté la façon dont l’argent s’engage et les personnes participent en Haïti, » se souvient son amie Jess Laporte de Waterbury, Vt., militante en haïtiano-américaine en matière de climat et de justice raciale qui travaille avec les ONG.

Dan Maxwell, professeur à Tufts University, qui était conseiller académique de Mme Robillard, l’a rencontrée pour la première fois alors qu’elle était étudiante en deuxième année à Tufts.

« Elle était déjà connue comme une force de la nature sur le campus lorsqu’elle avait 18 ou 19 ans, » a-t-il déclaré.

Et bien que plus récemment elle était doctorante, a-t-il ajouté, « elle était aussi comme une collègue, et à bien des égards, un leader que nous avons tous suivi. »

Mme Robillard était l’auteur principal d’un rapport de 2021, élaboré avec Teddy Atim et le professeur Maxwell, formulant un appel aux organisations internationales d’aide humanitaire à adopter une approche de « localisation »– en laissant aux groupes et aux individus locaux la planification et l’administration, plutôt que de les exclure comme cela a souvent été le cas dans le passé.

En octobre, l’Agence des États-Unis pour le développement international a publié un projet de « Politique de localisation de l’aide humanitaire » qui citait le rapport Tufts et s’inspirait de ses conclusions.

« J’étais certainement heureux de la voir vivre assez longtemps pour voir son oeuvre recevoir ce genre de validation de haut niveau, » dit le professeur Maxwell, qui a ajouté que Mme Robillard se démarquait par son sens des certitudes et par ses écrits.

« Elle était dotée d’une étoile polaire, » déclare-t-il. « Elle savait où elle allait, elle savait ce qui était juste. Bien qu’elle ne forçait pas les gens à être d’accord avec elle, elle pouvait affirmer avec assez d’insistance ce qui était bien et ce qui était mal. »

Elle disait souvent que la bonne approche était d’écouter plutôt que d’imposer une optique de l’extérieiur.

Après le tremblement de 2010 en Haïti, « ce que j’ai constaté de première main était la mesure dans laquelle les Haïtiens voulaient faire entendre leur voix dans la réponse, » a écrit Mme Robillard pour le site internet de CDA Collaborative Learning Projects, une ONG internationale basée à Cambridge pour laquelle elle a travaillé.

En Haïti, lorsque nécessaire, elle faisait se faufiler les militants dans les réunions tenues par les dirigeants d’organisations internationales à but non lucratif pour s’assurer que leurs voix se faisaient entendre par-dessus les autres — même la sienne.

 » Elle m’ a vraiment montré ce que c’est pour une personne blanche d’être une alliée dans le sens où nous en parlons de nos jours, » a affirmé Mme Laporte, qui a ajouté que « elle s’est donnée comme une énorme exemple d’apprentissage de l’écoute. »

Née à Philadelphie le 12 août 1988, Sabina Carlson était l’aînée de deux enfants et a passé son enfance principalement à Princeton Junction dans le New Jersey.

« Elle était très fière d’être une fille de New Jersey, et d’avoir grandi au son de la musique de Bruce Springsteen, » a dit son père, qui est à présent un scientifique de l’Institut Wyss de Harvard University.

La mère de Mme Robillard, Barbara Lepidus Carlson, travaille à la branche de Cambridge de Mathematica, centre de recherche en matière de politiques.

Portant le prénon de la cousine de sa grand-mère maternelle, tuée dans la Shoah alors qu’elle était enfant, Mme Robillard « ne se sentait pas à son aise si elle n’aidait pas autrui, » même lorsqu’elle était adolescente.

« Sabina était une géante, » d’après son frère Adam Carlson de Brooklyn, N.Y. lors de la cérémonie commémorative tenue en sa mémoire le 20 novembre à la Chapelle Goddard de Tufts. Après une pause, il a ajouté en souriant, « Pas au sens propre – elle était toute petite. »

Pourtant, leur mère a précisé par téléphone de la demeure familiale de Cambridge, « elle était une force qui va. Il ne fallait pas la sous-estimer. Elle ne reculait devant rien. »

Dès son plus jeune âge, » Mme Robillard canalisait sa détermination à aider les autres.

« Sabina se définissait toujours par un profond sens de l’empathie, » dit son père. « Son empathie était un sixième sens. Elle pensait toujours aux autres avant elle, même lorqu’elle était très, très jeune enfant. »

Elle était également musicienne multi-instrumentaliste, une poétesse de slam accomplie, et jouait un rôle de leadership à Amnistie Internationale et dans les groupes d’alliance gay-hétéros au cours de ses études secondaires.

Ayant initialement l’intention d’étudier l’écriture créative à Tufts, Mme Robillard s’est rapidement engagée dans le travail humanitaire, passant des mois loin de l’université en 2009 comme stagiaire auprès des réfugiés au Sud Soudan.

Elle a été diplômée l’année suivant, décrochant un baccalauréat en santé communautaire et études de paix et justice, pour recevoir par la suite un Masters en changement communautaire appliqué et consolidation de la paix. Tufts honorera par la suite Mme Robillard pour son travail humanitaire.

Durant les douze dernières années, elle a travaillé pour des organisations à but non lucratif et d’aide humanitaire telles que l’Organisation internationale de migration. Il y a plusieurs années, elle a pris part à la réponse de l’OIM face à l’épidémie d’Ébola en Guinée, et également à l’intervention de cette même structure face à une flambée de choléra en Haïti.

Parlant couramment le français et le créole haïtien, elle a pu être particulièrement efficace en Haïti, où elle a vécu à Cité Soleil, quartier surpeuplé et pauvre de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Et elle a fait usage de ses compétences linguistiques pour élever la voix de ceux qui vivaient en Haïti.

Une présentation faite lors de son service funèbre soulignait une citation d’elle: « Pourquoi l’assistance humanitaire localisée ne se concentre-t-elle pas sur la possibilité de laisser les communautés déterminer et mener les efforts visant à construire leur propre avenir? »

Parmi ceux qu’elle a rencontrés en Haïti, il y avait Louino Robillard, leader communautaire connu sous le nom de Robi, qu’elle épousera à Port-au-Prince en décembre 2012, et qui fut également son collaborateur.

Le mariage s’est accompagné d’autres rôles, en tant que belle-mère de la fille de ce dernier, Dayana Robillard, et mère de la fille née du couple, Anacaona, âgée de quatre ans.

Une décoloration sous l’oeil gauche de Mme Robillard, qu’on croyait bénigne au départ, s’est présentée en 2017. L’année suivante, durant sa grossesse, les analyses ont révélé qu’il s’agissait d’une tumeur maligne, et le cancer s’est ensuite propagé à ses poumons.

Elle a continué à travailler pendant quatre ans, même durant sa dernière journée de vie, « Sabina composait des emails adressés à Ana au cours des quatre dernières années — au total 358 communications, sachant qu’elle n’allait pas être là, » a dit sa mère.

Avec ses parents, son mari, sa belle-fille et sa fille, tous de la ville de Cambridge, et son frère, Mme Robillard laisse dans le deuil sa grand-mère maternelle, Luba Lepidus de Somerville.

L’époux de Mme Robillard transportera ses cendres au Pak nan Ginen, un espace vert et un projet de reforestation qu’ils ont co-fondé à Saint-Raphaël, Haïti, où il compte construire un mémorial. Parce qu’Haïti est gravement déboisé, « elle souhaitait utiliser ses cendres comme terre où planter des arbres, » a-t-il affirmé.

Il dit lui avoir tenu les mains durant ses derniers moments à l’hôpital Mass. General.

« Elle était citoyenne de justice, citoyenne de paix, citoyenne du bien. C’était ça Sabrina — partout, pour tous, » a déclaré Robi.

« Lorsque les gens demandent ce qu’ils peuvent faire pour moi, je réponds que je ne veux qu’on fasse quoi que ce soit pour moi, juste être une bonne personne, » a-t-il déclaré. « Quand vous aidez les autres, quand vous aidez l’environnement, quand vous faites la paix, c’est comme ça qu’elle reste encore en vie. »

Contacter Bryan Marquard à l’adresse  bryan.marquard@globe.com.

« Traduit de l’anglais par Guerda Romain-Chatelain »

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